Fabuleuses boites à bétel : la quintessence du raffinement asiatique.

Publié le par Eva Andréasson

Les boites à bétel birmanes nous enchantent. Cylindriques, réalisées en laque rouge, le couvercle coulissant sur de longs rebords elles admettent parfois un petit plateau de présentation s’intégrant dans l’ensemble comme des poupées russes. Réalisées dès le début du XVème siècle dans la région de Bagan, fameuse pour ses milliers de temples, elles connurent leur apogée au tournant des XIXème et XXème siècles. De fait, la noix de bétel était à l’époque très populaire : elle tenait lieu à la fois de plante médicinale, de friandise,  de denrée de société et aussi  de….. stupéfiant.

Fabuleuses boites à bétel : la quintessence du raffinement asiatique.

La technique de fabrication des boites à bétel, comme celle des laques, en général, implique un grand savoir-faire. Celui-ci a été développé en Birmanie depuis des siècles.  L’artisan doit préalablement réaliser les différents éléments de la boite en bambou tressé. Il les recouvre ensuite d’une pate composée de résine et d’argile. Deux couches successives plus fines brossées et polies préparent l’objet. L’artisan peut ainsi se consacrer à la tâche la plus délicate de l’opération : l’application de 7 à 9 couches de laque. La patience est maître mot. Il s’agit de respecter à chaque fois les temps de séchage : du nombre de couches apposées ainsi que du respect du timing dépend la qualité de l’objet. Une fois cette phase terminée, l’artisan peut se consacrer à la décoration de la boite qui traditionnellement respectait un nombre limité d’éléments chromatiques car issus de produits naturels.

 Les boites à bétel birmane connurent un grand succès du fait des qualités intrinsèques de la laque : en se séchant elle se solidifie, sa texture lui permettant de résister aux intempéries tout en admettant une certaine flexibilité. Par ailleurs les qualités esthétiques des boites sont indéniables : finesse,  souci du détail, symétrie de l’ensemble…

 La chique de la noix de bétel était très populaire dans toute l’Asie. Elle possède une connotation religieuse : la feuille de bétel ressemble à la feuille de l’arbre où le Bouddha reçu l’illumination. On lui reconnaît aussi un effet euphorisant. Selon la tradition asiatique elle est consommée avec un peu de chaux vive ainsi que du piment de noix d’arec pillé.

 Les qualités médicinales du bétel sont reconnues. Employé en tant que vermifuge, il facilite la digestion. La noix de bétel serait aussi efficace contre l’arthrite et les rhumatismes et aurait même des vertus aphrodisiaques.  Pourtant sa consommation répétée n’est pas sans danger. On a pu ainsi constater une proportion supérieure de cas de survenance de cancer de la mâchoire chez les gros « chiqueur » de bétel.

 Quoiqu’il ne soit, la richesse des instrument propres au bétel en particulier ces magnifiques boites laquées résulte du rôle social du bétel dans toute l’Asie. Ainsi en Birmanie on entraînait les enfants dès leur plus jeune âge à mâcher le bétel, gage de leurs capacités supposées à apprendre la langue birmane.

Fabuleuses boites à bétel : la quintessence du raffinement asiatique.

Au Vietnam, à la naissance de l’enfant, la mère ou la grand mère dessinait d’un trait la ligne des sourcils avec une feuille de bétel. Cette opération, disait-on, allait pouvoir déterminer le caractère du nourrisson.

 Autre exemple du rôle du bétel dans les liens sociaux : au Cambodge depuis l’époque Angkorienne la demande en mariage du promis auprès de la fiancée s’effectue via l’intermédiation de 3 femmes de la famille du futur marié qui apporte comme cadeau d’heureux présage à la famille de la jeune fille les meilleurs noix de bétel. L’absence de celle-ci impliquait obligatoirement le refus de l’union, tant la noix de bétel symbolisait les liens matrimoniaux.

 Enfin en Inde, les feuilles de bétel sont systématiquement distribuées avant chaque occasion heureuse, de même que deux feuilles de bétel et une noix d’arec sont systématiquement offertes aux dieux pendant la prière.

 Autant d’occasion, donc, de célébrer le bétel, sa noix, ses feuilles. Autant de prétexte de réalisation de merveilleux objets destinés à embellir les liens sociaux et familiaux. Les boites à bétel participent en cela à la fabuleuse légende du raffinement des civilisations asiatiques.    

Publié dans decoasia

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